Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de l'Abbé Benoît

Un blog qui donne de vivre joyeusement sa foi en Dieu Trinité. Faire connaître, aimer, adorer, louer Dieu en tout tant et en toute circonstance et vivre constamment dans l'action de grâce.

24ème Dimanche Année C :

Luc 15, 1-32

Nouvel épisode dans la montée de Jésus à Jérusalem - c'est la partie centrale de l'Evangile de Luc - nouvelle réaction de Jésus à une situation. Cette situation, c'est une critique de son comportement. Et Jésus va répondre par ces trois paraboles, qu'on n'a pas l'habitude de lire ensemble, l'une après l'autre, cela fait un peu long ; mais elles ne sont pas explicables l'une sans l'autre - même s'il arrive qu'on se concentre sur celle du père qui retrouve son enfant perdu.

Jésus est donc critiqué. Et comment va-t-il répondre à cette critique ? Tout simplement en disant que son attitude est celle de Dieu. Cela est manifeste dans les deux premières paraboles puisque, après avoir cité des exemples, il dit : " C'est ainsi qu'il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit ", il veut donc dire que les trois histoires, qu'il raconte pour illustrer son comportement, révèlent qui est Dieu. Et c'est d'abord ça que nous devons chercher dans ce texte. Jésus, par son comportement humain, est révélateur de Dieu. Comment Dieu se manifeste-t-il ? A travers Jésus. Et les trois paraboles sont là.

Dieu se manifeste comme un fou, un fou de l'amour. Les trois paraboles révèlent une démesure extraordinaire. Jésus a beau poser une question, on n'a pas la réponse. Mais la réponse que pourraient donner les scribes et les pharisiens à propos de la brebis perdue ou de la drachme perdue, ce serait de dire : " Mais, ça ne va plus ! " Et le berger qui va prendre le risque de perdre un troupeau entier pour sauver une brebis perdue, c'est de la folie ! Quelle est la maîtresse de maison qui, pour trouver une petite pièce, va faire le grand ménage de carême et nettoyer pendant huit jours de fond en comble pour une bricole ? ça ne tient pas la route, ça n'est pas sérieux, c'est de la démesure, c'est de la folie ! Et quel est le père, qui devant un fils qui lui fait tout voir, qui demande la moitié de ses biens, qui s'en va, qui gaspille tout, qui devient païen, qui perd sa religion, qui perd toute sa dignité, va faire une telle fête à son retour ? Ce n'est pas humain, ce n'est pas notre genre…

On peut dire : c'est la révélation de la miséricorde de Dieu comme une véritable folie, gratuite et totale, à découvrir ; et qui surprend, qui surprend tout le monde : qui va surprendre le fils aîné, qui va surprendre le fils cadet, qui surprend tout le monde.

Donc, Jésus révèle son attitude de fréquentation courante des pécheurs et des publicains -ces collaborateurs, pécheurs publics, qu'on n'avait pas le droit de rencontrer - voilà qu'il mange avec eux, comme étant le révélateur de la folie de Dieu.

D'une autre forme d'amour, on peut mesurer, si on écoutait la 1ère Lecture, l'avancée qu'il y a entre le message de Jésus et celui de Moïse. Le Dieu que révèle Moïse, il faut que Moïse le supplie d'être bon, en lui rappelant qu'il est bon. Ici, nous avons la folie de Dieu qui va au-delà de tout ce qu'on peut imaginer. " Dieu est Amour ", dira saint Jean. Eh bien, nous avons là une manifestation, révélée dans le comportement de Jésus, concrètement, par ces trois paraboles, ces trois histoires, ces trois exemples qui illustrent son comportement, cette bonté de Dieu.

Dans les trois cas, il y a quelque chose qui est perdu : un animal, une pièce, un homme. Dans les trois cas, il y a une démarche de recherche, jusqu'au bout, en risquant tout. " Dieu a tant aimé le monde - dira également Jean, dans sa première Lettre - qu'il a envoyé son Fils unique. Ce n'est pas nous qui avons aimé Dieu, c'est Dieu qui nous a aimés le premier. " Tout le mystère chrétien se retrouve ici, révélation de Dieu au-delà de tout.

Ces trois paraboles se ressemblent donc, avec le même message. Mais la troisième est un peu différente. Pourquoi ? Parce qu'il ne s'agit plus d'une brebis, il ne s'agit plus d'une pièce, il s'agit d'hommes. Et Dieu se manifeste comme ce père qui perd sa dignité en se mettant à courir ; un homme qui a de l'autorité ne se met pas à courir. Puis, il accueille son fils dans de telles conditions, il fait tuer le veau gras ; cette folie de ce père - on se demande s'il n'a pas perdu la tête - répond à une attitude de son fils.


Que révèle l'attitude du fils cadet : elle révèle comment on se perd, comme homme. C'est là le 2ème message de cette parabole. Après la révélation de qui est Dieu, qui sommes-nous ? Comment l'homme se perd-il ? Il se perd en ratant sa vie. Est-il déséquilibré ? Il demande son bien, pour quoi en faire ? Vraiment, il a tout gâché. Mais il se perd également en perdant la foi ; parce que les symboles de garder les porcs - le porc était le symbole de la Rome antique qui opprimait les hébreux, c'était le symbole du paganisme. On ne mange pas de viande de porc, on ne fréquente pas cet animal. Donc, non seulement ce fils galvaude sa propre vie, rate sa vie, mais il perd sa foi, il perd sa religion, il n'a plus de dignité, il devient le clochard qui n'a plus rien en lui ; nous pourrions développer cela : ça existe encore aujourd'hui, des hommes et des femmes qui perdent tout et qui deviennent ainsi. Qu'est-ce que c'est que se perdre ?

Et puis, quand on est perdu, est-ce qu'on peut encore retrouver Dieu ? Ce n'est pas une parole de conversion, il ne se convertit pas, ce garçon. Il a seulement un éclair de bon sens : " Je n'ai rien à perdre à retourner chez mon père ; je n'ai rien à perdre, j'ai tout à gagner. Oh, je serai peut-être un ouvrier, je n'aurai pas grand-chose, mais je serai mieux qu'ici, je n'ai rien à perdre, c'est la bouée de sauvetage… " Il faut au moins cette réponse là. L'homme est libre, l'homme s'engage, il ne peut pas revenir s'il ne veut pas. Donc, ne croyons pas qu'en imitant ce garçon, nous sommes des convertis. Nous sommes convertis par l'amour gratuit de Dieu. Mais il faut au moins cette démarche : " Je n'ai rien à perdre ", et il rentre chez son père. Et son père fait la fête.

Et il découvre que son père est autre ; il pense qu'il n'est plus digne d'être appelé son fils. Son père lui dit : " Tu es digne d'être appelé mon fils, parce tu es choisi comme fils, c'est gratuit. " On n'est pas fils par mérite, on est fils par grâce, par don, c'est gratuit. Donc, il doutait de son père. Qu'est-ce que c'est que se perdre ?


Et puis ensuite, le fils aîné : c'est la réponse pointue de Jésus à ses détracteurs. Le fils aîné, c'est eux, qui l'accusent de manger avec les publicains et les pécheurs ; c'est Israël qui refuse les païens. C'est dans l'Eglise primitive que ce texte a été écrit, 50 ans après la mort et la résurrection de Jésus, en reprenant son message bien sûr, mais en pensant également qu'il fallait encore le vivre dans l'Eglise : c'est l'accueil du païen dans la communauté primitive. On pensait d'abord que l'Eglise, c'était pour les juifs appelés par Dieu depuis Moïse. C'est vrai, ils sont appelés depuis Moïse, ils sont les fils aînés du Royaume de Dieu ; et nous sommes les païens convertis, ou les fils cadets.

Et Jésus fait comprendre que le salut, c'est pour eux également, et qu'il faut entrer à la table des païens, entrer à la table des petits, entrer à la table des étrangers, entrer à la table des immigrés. Il faut rencontrer tous ceux que Dieu appelle. Dieu sauve tout le monde. Et Jésus est mort pour que tous les hommes aient la vie, il est venu pour ça. Et l'attitude du fils aîné qui ne veut pas rentrer, qui est scandalisé : ce n'est pas possible ! Jésus lui demande de faire cet effort. On ne sait pas s'il va répondre. Va-t-il s'asseoir à sa table ? Va-t-il accepter de dire : ce gars que voilà, ton fils que voilà, que je rejette, peut redevenir mon frère. " Ton frère ", dit le père, c'est ton frère, et non " ton fils que voilà " ; ce n'est pas ce pauvre type, ce pauvre gars, ce clochard, ce bandit, ce vaurien… Passer de ça, de ce regard méprisant sur l'autre, à cet accueil du père. On ne sait pas s'il va le faire. La réponse est à lui, ce n'est pas Jésus qui va donner la réponse dans sa parabole - comme Jésus ne donne pas la réponse pour le fils cadet : qu'est-ce qu'il va devenir après ? La liberté des hommes reste entière. Mais la démarche de Dieu est annoncée, et il faut l'accueillir.

Et le fils aîné n'a pas découvert son père, il n'a pas vu qui était Dieu. Quand Dieu est là, tout est là, on n'a pas besoin de récompense, on n'a rien à attendre, Dieu est tout. Si Dieu est Amour à ce point là, c'est la fête. Il n'y a pas de mérite à gagner, on est à côté de lui, ça suffit. Il reproche à son père de ne pas lui avoir donné un chevreau pour fêter avec ses amis, mais il a pensé que son père était un employeur. Découvrir à fond toute la miséricorde de Dieu.

Voilà cette parabole. On pourrait parler longtemps là-dessus.


Mais il y a encore un point, que peut-être on ne soupçonne pas souvent dans l'Evangile, c'est que Jésus a trois manières d'agir : il agit par sa parole, il prêche - il agit par des gestes précis qu'il fait, il guérit, il met debout, il ressuscite, etc… - mais il agit également par son comportement, sa manière d'être. Et c'est bien de cela qu'il s'agit ici.


Alors pour nous, qui recevons ce message, et nous avons à nous demander : est-ce que nous avons découvert l'amour de Dieu, tout est grâce ? On a trop souvent, dans nos églises, parlé trop du mérite et pas assez du don gratuit de Dieu ; ça a été l'occasion de querelles énormes entre les protestants et nous - querelles qui sont maintenant apaisées dans une réconciliation qui a été signée officiellement il y a quelques années. C'est par grâce que nous sommes sauvés. Cela nous suffit, Dieu est avec nous. " Par lui, tout avec lui, tout est en lui, tout est de lui, comme dit saint Paul, à lui la gloire pour les siècles des siècles. " Nous avons tout avec lui.

Mais d'autre part, nous avons à proclamer ce message. Et comment le proclamer ? Eh bien, comme Jésus, par notre comportement. Notre comportement pose-t-il question, comme celui de Jésus ? Notre comportement doit être scandaleux pour les hommes. Nous voyons à quel point, dans nos pays, avec les problèmes de civilisation d'aujourd'hui, le problème de l'immigration, le problème du tiers-monde… nous voyons à quel point c'est dur de vivre l'amour jusqu'au bout, comme une folie.

Quels sont nos gestes de folie, par amour de Dieu, pour l'amour de Dieu, à l'image de Dieu ? C'est la question qui nous est posée. Comment nous comportons-nous simplement chaque jour ? Et si on nous demande pourquoi, eh bien nous pourrons raconter ces trois paraboles.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article